Petite histoire du service militaire 

en  Allemagne 

(et en Alsace - Moselle 1870-1918 et 1939-1945....)    

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Il n'est pas possible de faire une comparaison entre la situation en France et en Allemagne surtout du fait de l'existence de différents états  allemands jusqu'en 1919.

Pour mémoire, au XIX ème siècle, on peut citer principalement le Brandebourg Prusse ( royaume), la Bavière (duché, royaume) et le Wurtemberg (duché, royaume), mais il y en avait de nombreux autres (38, avec quelques variations au cours du siècle), chacun avec sa spécificité.

Du fait de son importance, on va prendre la Prusse en exemple. Cet état a le plus grand nombre d'habitants, la plus grande armée, l'expérience de guerres victorieuses contre l'Autriche et la France, une solide alliance noblesse-grand capital et de fortes personnalités comme Biskark: 

En préparant l'introduction du service militaire obligatoire le général prussien Gerhard von Scharnhorst, réorganisateur de l'armée prussienne en 1813, donna aux jeunes gens des classes instruites et possédantes  (Jungen Leuten der gebildeten and besitzenden Stände) le droit de s'enrôler dans dans les détachements de chasseurs volontaires (Freiwillingen Jäger Detachements) . On trouve pendant les guerres de libération contre Napoléon (1813-1815) dans ces unités de volontaires, beaucoup d"étudiants (environ 2000) et des personnages connus comme Adolf Freiherr von Lützow du fameux Lützowsche Freikorps.On y trouve également des écrivains comme Joseph Freiherr von Eichendorff et Theodor Köner dont le poème "Lützows wilde verwegene Jagd" a été mis en musique par Carl Maria von Weber.. A l'introduction du service militaire obligatoire de trois ans en 1814, les privilèges des Freikorps furent conservés et, en dehors des périodes de guerre, ils ne faisaient qu'un service d'un an. 

 Le service militaire obligatoire (allgemeine Wehrpflicht) fut introduit en Prusse par la loi du 3 août 1814 (Gesetz über die Verpflichtung zum Kriegsdienst) à l'occasion des guerres de libération contre Napoléon. Tous les citoyens, dès l'âge de 20 ans, devaient accomplir un service d'une durée de 3 ans, sans exemptions ni remplacement. Il y avait aussi une armée de réserve (Landwehr) pour les hommes de 15 à 60 ans qui ne qualifiaient pas pour le service actif.

Bismark créa la confédération d'Allemagne du Nord (Norddeutscher Bund) en fédérant 17  États. Cette Confédération dura de 1867 à 1870. Le président en était le Roi de Prusse. Les troupes de ces États furent placées sous ses ordres.. La loi du 9 novembre 1867 (Gesetz, betreffend die Verpflichtung zum Kriegsdienste) stipule que dans tous les États de la Confédération, tout homme dès l'âge de 20 ans était astreint à un service militaire obligatoire dont la durée était de sept ans, dont trois ans de service actif ininterrompu et de quatre ans dans la réserve.

Sous le deuxième empire germanique (1871-1918) les différents états Allemands avaient leurs armées placées sous commandement Prussien. Il en résultait une double numérotation des régiments. Par exemple, un Saxon, bien que né dans une province prussienne, faisait son service dans une unité saxonne. 

Avec la fin de l'Empire Allemand, commença l'époque de la Reichswehr, l'armée de la République de Weimar (1918-1933) dont l'effectif était limité à 100.000 hommes par le traité de Versailles. Il s'agissait d'une armée de métier . Les soldats devaient s'engager pour une durée de 12 ans et les officiers pour 25 ans. Un "Reichswehrsoldat" n'avait pas, entre autres, le droit de vote ni de faire de la politique.

Le 16 mars 1935, la Wehrmacht fut créée par Hitler avec l'introduction du service militaire obligatoire pour les jeunes de 18 ans et d'une durée de deux ans à partir  de l'automne 1936.

Par la loi du 21 juillet 1956, le service obligatoire dans la Bundeswehr fut introduit dans la République Fédérale d'Allemagne pour les hommes à partir de l'âge de 18 ans et pour une durée de 18 mois (passé à 9 mois actuellement).

Le fonctionnement de la Bundeswehr est  très éloigné de celui des armées Allemandes précédentes. Le soldat n'est plus "taillable et corvéable à merci" par sa hiérarchie. Il est un citoyen en uniforme (Staatsbürger in Uniform) qui a, par exemple, le droit sans respecter la voie hiérarchique, de s'adresser directement au médiateur parlementaire auprès des Armées (Wehrbeauftragten) pour se plaindre de ses supérieurs.. Selon le code du soldat (Soldatengesetz), celui-ci doit obéir à ses supérieurs, mais il n'est pas désobéissant s'il n'exécute pas un ordre qui ne vise pas un objectif militaire, du style "soldat cirez mes godasses" ou à un ordre qui blesse sa dignité humaine. Il lui est strictement interdit d'obéir à un ordre qui entraîne un crime ou délit.

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Situation particulière des Alsaciens et Mosellans.

Il faut bien comprendre que de 1871 à 1918 (et ensuite de 1940 à 1944), les Alsaciens résidant en Alsace (même chose pour les Mosellans) étaient de facto des citoyens Allemands et devaient se conformer à toutes les loi Allemandes, incluant l'obligation du service militaire et les ordres de mobilisation.  l'Alsace et la Moselle étaient "Reichsland" mais sous contrôle Prussien. En conséquence, les ressortissant de cette région étaient logiquement incorporés  dans des unités prussiennes. Par prudence, probablement pour rendre les désertions plus difficiles, il semble que les Alsaciens et Mosellans aient été systématiquement envoyés combattre sur le front de l'Est pendant la première guerre mondiale. L'armé russe, contrairement à l'armée soviétique pendant la deuxième guerre mondiale, a fait de son mieux pour rapatrier les Alsaciens en France. Certains prisonniers ont traversé toute la Russie en groupe pour s'embarquer à Vladivostok pour ne pas courir le risque d'un torpillage si l'embarquement avait eu lieu à Mourmansk!

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*  En plus de l'école, l'armée a été utilisée comme facteur d'intégration par les Allemands à partir de 1870. Dès 1872, le service militaire devint obligatoire pendant une période de trois ans. Les recrues qui subissaient le drill prussien n'en gardaient pas en général un mauvais souvenir. Dans bien des foyers on pouvait voir les diplômes qu'ils avaient rapportés, les représentant en général à cheval, en uniforme de parade, à l'aide d'un montage photographique où figurait aussi un portrait de l'Empereur. Les soldats Alsaciens et Mosellans qui avaient eu le privilège d'être passés en revue par lui semblaient en avoir conservé un souvenir admiratif. Ils décrivait Guillaume II comme un personnalité pleine de prestance et de majesté, contribuant ainsi, involontairement, à forger une image plus positive de l'Allemagne parmi leurs proches. Ces diplômes sont souvent restés accrochés pendant des décennies, même après que l'Alsace fut redevenue française. Presque cinquante ans (2 générations) de régime Prussien, ça finit par marquer la population, surtout quand il y avait de nombreuses choses positives!

*  Sous le  deuxième empire germanique (1871-1918) les jeunes Alsaciens qui avaient poursuivi des études au delà du primaire ont, eux aussi , bénéficié  de la possibilité de faire seulement une année de service. Ils devenaient des volontaires pour un an (Einjhare Freiwillige). Après six semaines de formation en caserne, ces volontaires devenaient des officiers et prêtaient serment à l'Empereur. Ils bénéficiaient ensuite d'un régime très souple. Dispensés de corvées, ils ne logeaient pas à la caserne disposaient d'une ordonnance. Ce régime favorisait leur intégration dans la société allemande. Ils étaient reçus dans le milieu des officiers. Certains devenaient et restaient germanophiles. Les liens avec l'armée n'étaient pas rompus au terme de l'année. Ils avaient l'obligation de se présenter deux fois par an pour un contrôle. Beaucoup se retrouvaient au sein de sociétés de vétérans, les Kriegervereine, qui avaient pour vocation de propager les idées pangermanistes, les valeurs militaires et de célébrer le culte du Kaiser et de la famille des Hohenzollern.

*  A titre d'exemple, lors de la célébration du 25ème anniversaire de la fondation du Kriegerverein de Lauterbourg, en 1912, les cercles de dix villages situés dans un rayon de 15 kilomètres envoyèrent une délégation. Les notables de la ville ainsi que la population participèrent à la fête.

L'école, l'armée et l'Université ont été de puissants outils d'intégration au  Reischland.

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Pendant la deuxième guerre mondiale, a partir du 12 octobre 1942, de très nombreux Alsaciens furent enrôlés de force dans l'armée Allemande (la Wehrmacht) . Environ 130.000 en Alsace et 30.000 en Moselle. Ce sont ceux que l'on nomme les "malgré-nous" dont le plus grand nombre partira sur le front Russe. Les survivants en majorité ont été faits prisonniers et incarcérés dans des camps en Russie (dont le camp de Tambov) où plus de 17000 périrent. Pour plus de renseignements/détails, visitez la page sur les incorporés de force 

Un certain nombre d'Alsaciens furent également incorporés dans des unités de la Waffen-SS (à ne pas confondre avec les SS où n'entraient que des hitlériens convaincus). Ceci explique la présence d'Alsaciens à Ouradour sur Glane.

Aucune autre région Française n'a connu comme l'Alsace et la Moselle le déchirement d'avoir certains de ses enfants morts "pour la Patrie" sous l'uniforme Français ou sous l'uniforme Allemand, parfois dans la même famille! Pour plus d'information, visiter la page "à nos morts"

*  Ces 3 paragraphes sont extraits du livre "La vie quotidienne en Alsace et entre France et Allemagne 1850-1950" d'Alfred Wahl et Jean Claude Richez

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